Etapes et enjeux de la recherche clinique

La recherche clinique, cœur de l’innovation pharmaceutique

Place de la recherche clinique dans le cycle de vie du médicament

Figure 1 : Le parcours du médicament de la recherche à la mise sur le marché.

Figure 1 : Le parcours du médicament de la recherche à la mise sur le marché.

 

Légende : *Certificat complémentaire de protection, *Autorisation de mise sur le marché.

Sources : Leem.org, Institutmontaigne.org. Consultés en août 2022.

Le processus d’innovation débute par la découverte de nouvelles molécules ou mécanismes d’actions par le biais de la recherche fondamentale. Lorsque celle-ci offre des résultats prometteurs, des essais de recherche préclinique, menés in vitro sur des cellules et/ou in vivo sur des modèles animaux, sont conduits. Si les résultats sont validés, la recherche clinique peut débuter, afin de démontrer, ou non, l’efficacité du traitement sur l’homme, tout en mesurant ses effets potentiels secondaires. L’analyse des données issues de ces études ouvre enfin la voie à son autorisation de mise sur le marché (AMM) et à sa commercialisation.

La recherche fondamentale, au commencement

La recherche fondamentale permet de mieux comprendre les mécanismes d’une pathologie et les potentielles cibles thérapeutiques, et de produire de nouvelles connaissances. En France, elle est majoritairement publique et financée par des institutions comme l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), ou les universités. Imprévisible en termes de résultats, elle est pourtant à la base des progrès scientifiques les plus significatifs.

La recherche appliquée permet ensuite d’identifier ou de créer des molécules actives qui pourraient avoir une action spécifique contre la maladie étudiée. Toutefois, qu’elle provienne de travaux privés ou publics, qu’elle soit le fruit de recherches ciblées ou d’une découverte fortuite, une molécule d’intérêt a très peu de chance d’être commercialisée. Parmi 10 000 molécules identifiées, seulement l’une d’entre elles deviendra un médicament effectivement commercialisé (Source : Leem.org. Consulté en août 2022.).

Brevet, clé de l’investissement dans la recherche

Le dépôt d’une demande de brevet intervient au tout début du cycle de vie du médicament, au moment où la molécule est identifiée. Essentiel au financement de la recherche, il permet de protéger l’innovation pendant vingt ans. Mais le chemin entre les premières phases de recherche et l’accès au traitement du patient est long : douze ans en moyenne (Source : Leem.org. Consulté en août 2022.), complexe et coûteux. Ainsi, la période d’exclusivité commerciale d’un traitement est limitée avant que le brevet ne tombe dans le domaine public. Cette période peut cependant être prolongée pour une durée maximale de cinq ans par un certificat complémentaire de protection (CCP).

En France, le brevet est déposé à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) ou à l’Office européen des brevets (OEB) pour être validé. Pour que le brevet soit valide dans d’autres pays, il doit être déposé dans les agences des pays concernés.

La recherche préclinique, preuve de concept avant le passage à l’homme

Figure 2 : De la recherche préclinique à la mise sur le marché – Partie 1.

Figure 2 : De la recherche préclinique à la mise sur le marché – Partie 1.

 

Source : Ressources internes d'IQVIA. Consultées en août 2022.

Seules les molécules identifiées lors de la phase de recherche fondamentale comme ayant un caractère innovant en termes de stratégie thérapeutique ou comme répondant à un besoin médical non couvert sont ensuite étudiées en phase préclinique. Ces candidats médicaments doivent alors impérativement répondre à une série de tests avant de pouvoir être administrés chez l’homme.

Les essais précliniques sont toujours réalisés sur des animaux, des cellules ou des cultures. On distingue trois temps distincts :

 

Figure 3 : Les différentes composantes de la recherche préclinique.

Figure 3 : Les différentes composantes de la recherche préclinique.

 

Source : Ressources internes d'IQVIA. Consultées en août 2022.

« Pharmacologie expérimentale » : Ces essais ont pour but de valider l’effet thérapeutique attendu du candidat médicament. Les tests sont réalisés sur des modèles animaux, des cellules ou des cultures. 

« Toxicologie » : Ces essais permettent d’évaluer les risques liés à l’utilisation du produit de santé comme les effets sur le développement du foetus 

« Pharmacocinétique et métabolisme » : Ces essais vont aider à comprendre les mécanismes de diffusion, de distribution et d’élimination du candidat médicament une fois dans le corps.

 

Si les résultats de ces essais sont positifs, alors le médicament peut entrer en phase d’essai clinique sur l’homme. Seule une molécule sur dix passe l’épreuve de la phase préclinique (Source : Leem.org. Consulté en août 2022.).

Recherche clinique : à la recherche de preuves d’efficacité et de sûreté

Figure 4 : De la recherche préclinique à la mise sur le marché – Partie 2.

Figure 4 : De la recherche préclinique à la mise sur le marché – Partie 2.

 

Source : Ressources internes d'IQVIA. Consultées en août 2022.

Trois phases, trois objectifs

La recherche clinique est menée à travers une série d’essais sur l’homme afin d’apporter les preuves d’efficacité et de sécurité indispensables à la mise sur le marché des médicaments. Cette activité est hautement réglementée et contrôlée.

Les essais cliniques sont constitués de quatre phases. Les trois premières (I, II, et III) permettent d’évaluer les risques pour les patients, ainsi que le bénéfice clinique attendu. Une phase IV prend enfin le relais afin de suivre le médicament après sa commercialisation, « en vraie vie ».

  • Phase I : Cette phase vise à évaluer la tolérance du produit et son innocuité, notamment chez des volontaires sains. Des doses croissantes leur sont administrées sous contrôle hospitalier et sous surveillance constante. Ces essais sont réalisés sur un petit nombre de volontaires sains, sauf si la molécule est trop toxique pour être administrée sans risque (pour un anticancéreux par exemple, où l’essai est réalisé sur des malades) et pour une courte durée. À la fin de cette phase, la dose et la fréquence d'administration du produit sont déterminées pour les phases suivantes.
  • Phase II : Il s’agit ici de démontrer l’efficacité du produit et de définir la dose optimale (meilleur bénéfice et effets secondaires moindres). Ces essais sont réalisés sur des petits nombres de patients en phase IIa puis IIb. Ils permettent ainsi de valider les hypothèses de traitements de la molécule testée. Afin de gagner du temps, certains protocoles de recherche de phase I sont jumelés avec les essais de phase IIa.
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Dans le cadre de résultats extrêmement encourageants dès cette phase II, des procédures d’accélération, « Fast Track », pour l’accès au marché peuvent être mises en place par l’Agence européenne des médicaments (European Medecines Agency, EMA).

  • Phase III : Ces essais, menés sur de larges populations de malades, permettent de comparer l'efficacité thérapeutique de la molécule au traitement de référence (s’il existe) ou bien à un placebo. Afin d'écarter tout biais de l'une ou l'autre partie sur l’efficacité ou les effets indésirables et quand cela est possible, ni le patient, ni l'équipe médicale ne savent quel traitement reçoit chacun des malades. On parle alors d’essai en double aveugle.
  • Phase IV : Ces essais sont réalisés après l’obtention de l’AMM et font partie des conditions réglementaires de la mise sur le marché. Il s’agit de s’assurer de la pharmacovigilance, mais également des conditions de sécurité du produit « en vie réelle ». Tout accident de santé lié à la prise de médicaments est obligatoirement signalé dans un délai précis aux instances réglementaires. Les entreprises remettent en outre régulièrement des rapports aux autorités de santé pendant la durée de commercialisation du produit.

Figure 5 : Tableau de synthèse des étapes d’un essai clinique.

Figure 5 : Tableau de synthèse des étapes d’un essai clinique.

 

Source : Ansm.sante.fr. Consulté en août 2022.

Une réglementation des essais cliniques précise et qui tend à s’harmoniser

Selon la loi Jardé de 2016, les recherches qui impliquent la personne humaine sont classées selon la nature de l'intervention (intervention sur des personnes volontaires ou recherche observationnelle) et le niveau de risque et de contrainte imposé aux volontaires de l’étude.

Il existe trois catégories de recherches :

  • Catégorie 1 : risques non-négligeables pour les volontaires sains et patients y prenant part ;
  • Catégorie 2 : risques et contraintes minimes. Leur champ se limite à une liste d’interventions établie par le ministère de la Santé (exemple : examens biologiques) ;
  • Catégorie 3 : recherches observationnelles comme la comparaison de pratiques entre deux centres de soins, la mise en place d’un questionnaire de qualité de vie (exemple : mise en place d’un questionnaire de qualité de vie).

À compter du 31 janvier 2022, un nouveau règlement visant à simplifier et à harmoniser les autorisations d’essais cliniques à l’échelle de l’Union Européenne est entré en vigueur. Toute demande de lancement d’essai clinique peut être déposée via le portail européen Clinical Trial Information System (CTIS). Cette nouvelle plateforme constitue un point d’entrée unique pour les demandes et les autorisations d’essais cliniques de l’ensemble des États membres de l’Union européenne (UE) et de l’Espace économique européen (EEE). Les autorités compétentes locales sont ensuite chargées de l’évaluation et de l’autorisation d’un essai clinique.

 

Figure 6 : Nouvelle chaîne de décision de l’autorisation des études interventionnelles en France.

Figure 6 : Nouvelle chaîne de décision de l’autorisation des études interventionnelles en France.

 

Source : ansm.sante.fr. Consulté en mars 2023.

Selon la nouvelle doctrine de l’ANSM, après confirmation de la validité de l’essai par l’EMR, une autorisation (partielle ou non) de l’ANSM et un avis favorable (partiel ou nom) du CPP sont nécessaires au lancement de l’essai.

Cette nouvelle réglementation affecte la circulation de l’information. Désormais, le promoteur notifie aux EMC, par l'intermédiaire de la base de données Eudravigilance (gérée par l’Agence européenne des médicaments, EMA) tous les effets indésirables graves et inattendus (EIGI) entre 7 et 15 jours après en avoir été informé en fonction du degré de gravité.

Afin d'accompagner ces changements de processus d’autorisation d’un essai clinique, une période de 3 ans est prévue pour une transition complète et aboutie au 31 janvier 2025.

Une nouvelle option thérapeutique pour les patients

Le lancement d’un essai clinique est un processus complexe impliquant de nombreux acteurs.

Figure 7 : Les différentes étapes du lancement d'un essai clinique

Figure 7 : Les différentes étapes du lancement d'un essai clinique

 

Source : Ressources internes d'IQVIA. Consulté en août 2022.

« Promoteur » : Personne physique ou morale à l’initiative de l’essai. Il rédige le protocole de l’essai clinique et fixe le nombre de patients à inclure. Il choisit également les centres investigateurs. 

« Investigateur » : Il dirige et surveille la réalisation de l’essai clinique. L’investigateur est responsable de vérifier l’éligibilité des patients au protocole et d’informer le patient sur des risques et bénéfices attendues de l’essai. Chaque investigateur doit recruter un nombre suffisant de patients, discuté au préalable avec le promoteur.  

« ANSM » : L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé assure la gestion et l’évaluation des recherches dans l’optique d’assurer la sécurité des personnes. Son avis doit être obligatoirement favorable pour mettre en place un essai clinique.  

« CPP » : Les Comités de Protection des Personnes se prononcent sur le bien-fondé et la pertinence d’un projet de recherche avant sa mise en place. Un avis favorable du CPP es obligatoire pour démarrer un essai clinique.  

« Direction hospitalière » : La direction hospitalière est chargée de piloter et de suivre l’ensemble des projets de recherche qui sont développés au sein de l’hôpital et les ressources nécessaires à leur réalisation, dans le respect des bonnes pratiques cliniques et de la sécurité des patients qui y participent.  

« Patient » : Un patient souhaitant participer à un essai clinique doit répondre aux critères d’éligibilité définis par le protocole d’essai clinique. S’il est sélectionné, il devra signer un formulaire de consentement. 

 

Ces essais cliniques représentent, pour certains malades, un accès privilégié à des thérapeutiques innovantes. Les patients en situation d’impasse thérapeutique en particulier peuvent ainsi bénéficier d’un traitement innovant plusieurs années avant sa possible mise sur le marché.

Le recrutement est une étape clé du lancement d’un essai clinique. Il se définit par le processus au cours duquel des personnes éligibles sont identifiées et consentent à participer à l’essai après avoir reçu une information claire, complète et compréhensible. L’objectif du recrutement est d’inclure dans l’essai un nombre suffisant de participants appropriés et représentatifs de la population cible.

Le consentement « libre et éclairé » du patient

La participation d’une personne à un essai thérapeutique doit résulter de son consentement libre et éclairé, c’est-à-dire que le participant potentiel doit avoir été informé et avoir compris l’objectif de la recherche, la méthodologie, les bénéfices attendus, les contraintes et les risques prévisibles.  À noter que le participant peut retirer son consentement à tout moment et quitter l’étude sans aucun préjudice.

 

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NO-FR-2400125-NP- Juin 2024